Le confinement a vaincu par KO tous ceux qui l’ont défié, à tel point qu’ils sont tous rentrés chez eux. Y compris les « agilistes », les développeurs.

De fait, les valeurs et principes de l’Agilité se trouvent malmenés face à une situation non prévue, non imaginée par les concepteurs de la démarche. Comment faire en mode confiné pour « accorder de l’importance aux individus et à leurs interactions », pour faire travailler ensemble quotidiennement les développeurs avec les utilisateurs (ou leurs représentants) ? Comment faire sans la co-localisation de toutes les personnes travaillant ensemble ? Comment faire alors que le dialogue « physique » en face à face devient impossible.

Les projets, les plateformes, les usines de software ne peuvent pas s’arrêter. Celui qui sait s’adapter est celui qui survit, disait Darwin. Alors qu’est-ce que cette période apprend à TASMANE, observateur privilégié de ces dispositifs humains en train d’essayer de conserver une bonne efficacité dans un modèle agile largement basé sur la proximité physique ?

Synthèse de l'agilité

Autant le dire tout de suite : certains arrivent très bien à fonctionner en mode agile dans une période de confinement. Et la première raison est qu’ils avaient déjà beaucoup et bien travaillé ensemble en plateau ; ainsi ils avaient créé un véritable lien entre tous les membres de leur « tribu ».

Pour ceux qui démarrent en agilité ou dont l’organisation était « bancale » avant le confinement, la marche est nettement plus haute, sans pour autant être inaccessible.

Pour faire face à cette situation de confinement, il est nécessaire de mettre en place des pratiques et des outils permettant de revisiter les modes de travail, de communication et de partage.

TASMANE propose dans cette série d’articles d’explorer les raisons et les moyens qui vont vous permettre de réussir à travailler en agilité malgré le confinement.

Cet article est divisé en 5 sections, qui explorent les impacts du confinement sous différents angles :

Aspects de l'agillité

Chapitre 1 : l’organisation personnelle

 

En mode télétravail, la bonne organisation d’un membre d’une squad agile s’appuie sur des règles simples, qui peuvent s’appliquer à l’ensemble des télétravailleurs : organiser ses journées avec soin, répartir le temps connecté et le temps déconnecté, faire des « mini » pauses, mais nombreuses …

Organiser sa journée, c’est se dire le matin : ce soir je serais content si j’ai réussi à faire cela, si j’ai réussi à produire cela, si cette réunion que je vais animer a produit tel résultat, …

Beaucoup de feedbacks indiquent que l’implication et les temps de travail sont plus élevés (ou durs à maitriser) pour chacun pendant le confinement. La difficulté réside aussi dans la « sur-sollicitation » du fait de la multiplicité et la disponibilité immédiate des outils : Outlook, Teams, Slack, Zoom, Skype, WhatsApp… en plus du téléphone.

L’agiliste confiné (ou pas, d’ailleurs) doit être bien équipé avec tous les outils du fonctionnement en collectif, de la collaboration et du partage d’information. Il est important qu’il ait accès à un fil d’échange, pour solliciter ses collègues quand il a en besoin, et ressentir la vie de l’équipe. Il ne doit pas se sentir seul derrière son écran et se demander à la fin de la journée s’il a produit un résultat utile.

Et la bonne façon de ne pas se sentir seul est de prévoir dans la semaine des moments de convivialité, à distance, avec les autres membres de l’équipe, en mode informel, sans parler du travail si possible. Ces moments de convivialité peuvent donner lieu à des cafés virtuels, des apéros en ligne ou encore des jeux en ligne (pictionary, quiz, dessiner à plusieurs, etc.).

Chapitre 2 : L’agilité au niveau de l’équipe

Équipe agile, ou Squad, ou Product Team, on parle bien ici de la cellule de base absolument clé pour une approche produit / agilité. Sa composition peut varier, mais on y trouve a minima un Product Owner, un Scrum/Agile Master, un Tech Lead, des développeurs.

Les collaborateurs dans ces équipes sont généralement des utilisateurs aguerris des outils digitaux. Ils savent individuellement les manipuler et travailler à distance. L’enjeu est de les faire travailler en équipe.

Si parfois, certaines équipes se disent pouvoir faire sans Scrum Master, considérant la maturité de l’équipe suffisante, celui-ci devient incontournable en période de confinement, car il porte le succès de l’animation agile des équipes confinées.

Le rôle du Scrum Master

Le confinement remet le SM dans son véritable rôle d’animateur et de facilitateur au niveau de l’équipe agile.

Il doit développer une plus grande proximité avec chaque membre de l’équipe pour apporter la cohérence d’ensemble. Il va aider les équipiers sur leur organisation personnelle, leur temps de travail. Il apporte aussi l’écoute et la confiance nécessaires face aux manques de relations sociales. Il est entrainant, maintient le moral et l’envie face au confinement (surtout quand cela dure plus qu’imaginé au départ).

Son temps se partage entre des points individuels et les rituels collectifs. Il doit aussi et surtout sortir de son paradigme habituel : proposer des solutions nouvelles face  à des situations nouvelles tout en respectant les principes  de l’agilité. Le SM doit savoir interpréter les grands préceptes et adapter les pratiques agiles à la situation de confinement et permettre ainsi aux équipes d’atteindre leurs objectifs. Adaptation et créativité pour les rituels, les réunions de brainstorming, de co-construction, les démos. Outillage, partage, accès à l’information, expression et avis de chaque membre, vote, contrôle qualité… tous les moyens doivent être utilisés.

L’agilité en confinement : formidable accélérateur de l’auto-organisation !

C’est un slogan de l’agilité : les équipes sont auto-organisées. Les membres de la Squad déterminent, souvent par ajustements successifs, les meilleures pratiques de fonctionnement dans le sens de l’efficacité. Et cela sans avoir besoin d’un chef qui fixe les règles.

Face au confinement, l’équipe doit forcément être créative et faire évoluer les pratiques, dans l’objectif de conserver au mieux la vélocité d’avant. Chaque équipe dans son format est singulière, encore plus dans son format de personnes confinées : avec ou sans enfant, avec des contraintes, … L’équipe doit absolument prendre la main sur ses modes de fonctionnement en mode confiné.

Le Scrum Master doit bien se garder d’imposer des solutions. Sans adhésion, cela devient contre-productif. Sur la définition des nouvelles pratiques, il faut utiliser les mêmes techniques que pour le logiciel : réunion virtuelle dédiée avec tableau numérique, post-it … dans un esprit privilégiant la co- construction. L’animateur doit trouver les bonnes façons pour permettre à chacun de s’exprimer et d’être créatif.

 

Les interactions en toute quiétude

Chacun doit pouvoir interpeller ses collègues, poser une question « idiote » ou de candide, à propos d’un bout

de code ou d’un outil. Et avoir un retour sans remarque suffisante, sans feedback ironique, en privilégiant le style direct au second degré. De fait, ces questions « de candide » rendent service souvent à d’autres collègues (qui n’osaient pas), et améliorent le savoir du collectif.

Le Scrum Master doit veiller à cette bienveillance généralisée au sein de l’équipe et rappeler au collectif les bons comportements. La mise en place d’un fil d’interactions permanent et bienveillant, avec tous les équipiers connectés, est une bonne solution.

Par exemple, on peut se rapprocher du format d’une rétrospective en exprimant ce qui fait la force de l’équipe habituellement, et définir les axes d’amélioration pour pallier les manques/difficultés créés par le confinement. Et puis essayer vite, faire un point au pas du Sprint pour se remettre en question et s’adapter.

Que deviennent les rituels ?

Ils sont maintenus, voire renforcés dans certains cas :

• les dailys sont l’occasion de retrouver tout le monde le matin et renforcer le lien d’équipe

• les raffinages et les rétros sont animés via de nouveaux outils et donc très efficaces

• les revues sont plus accessibles avec une meilleure qualité de partage des supports (effort de formalisation et de diffusion) et paradoxalement une plus grande disponibilité des parties prenantes

EN SYNTHÈSE

Un Scrum Master en action, auprès des individus et du collectif. Un Scrum Master qui stimule la créativité pour s’organiser différemment. Des rituels qui perdurent, en mode aménagés, et qui ne perdent pas en efficacité. Des échanges permanents, en toute bienveillance.

Rituels agiles

Chapitre 3 – L’agilité à l’échelle

Le PI Planning

Nous sommes dans l’absence de visibilité sur le retour à des conditions de travail normales ; en effet, il est à peu près clair qu’on ne pourra pas organiser un PI à 80 personnes en respectant la distanciation sociale avant l’été ! Cela oblige à revoir le mode de planification des travaux et notamment la cérémonie du PI Planning. 

Avec une première mesure qui est de diminuer le délai entre deux releases !

Par exemple, passage d’une Release de 5×2 sprints de 2 semaines (4 sprints de fabrication + 1 sprint d’innovation) à une Release de 3×2 sprints de 2 semaines (2 sprints de fabrication + 1 sprint d’innovation).

Ce qui permet d’ajuster la durée de la Release pour la faire terminer à une date liée à un jalon supposé de déconfinement. Avec donc la possibilité d’organiser juste derrière un PI Planning plus proche de ceux habituellement organisés et de repartir sur le rythme de départ dès la fin du confinement.

Pour réaliser ce PI Planning dégradé en mode confiné :
  • La cérémonie de PI Planning s’organise sur 1 semaine au lieu de 2 jours.
  • Chaque Product Team s’auto-organise pendant une semaine pour cadrer les besoins embarqués avec un représentant métier (Responsable Marketing ou Offre ou Parcours Client). Le grand enjeu est d’essayer d’identifier un interlocuteur métier unique par Product Team pour ne pas multiplier les échanges et éviter les pertes d’information.
  • Créer un « Program Board » virtuel et le faire coéditer tout le long de la semaine par chacune des Product Teams. Les solutions à mettre en œuvre doivent être simple (exemple : modèle PPT commun sur MS Teams ou sur Google Slides).
  • Les activités classiques de fin de PI Planning (retours sur les décisions d’arbitrage, prise en compte dans le PI Board, mise en avant des dépendances, gestion des risques et vote de confiance) sont à conserver en plénière, mais en comité restreint (uniquement POs, PM, BO, RTE, Architecte Plateforme et autres acteurs clés).
Des sprints « innovation » pendant la période de confinement

La disponibilité des métiers est variable du fait de la crise et du manque de pratique sur les outillages de travail à distance. Les échanges sur le cadrage de leurs besoins sont compliqués.

L’idée est donc de profiter de la période de confinement pour mener un ou deux sprints dits « innovation ». Le Sprint d’Innovation sert à toute l’organisation :

  • C’est un Sprint qui dure le même temps que les autres Sprints
  • Il est positionné en fin de Release juste avant le lancement en production
  • C’est pendant ce Sprint que la Release Team finalise les derniers éléments de validation avant la Mise En Production
  • C’est pendant ce Sprint que les équipes corrigent les derniers bugs s’il y en a
  • Résorber la dette technique, développer les « enablers » techniques
  • Traiter certains retours utilisateurs sur des améliorations simples
  • Faire de l’innovation : faire des PoC, tester des nouvelles briques techniques, faire évoluer l’architecture des composants
  • Préparer la release suivante

La mise en œuvre des enablers techniques ne nécessitent pas de cadrage métier et fait intervenir plutôt des collaborateurs de la filière SI, qui sont plus à l’aise avec les outils nécessaires en période de confinement. Cela permet aux équipes de diminuer leur backlog, de continuer à avancer et d’être en capacité technique de répondre plus rapidement pour réaliser les nouvelles fonctionnalités.

Le métier peut et doit travailler de son côté pour :

  • Préparer la release suivante et s’accorder sur les objectifs définitifs à atteindre
  • Finaliser les parcours métiers à mettre en œuvre
  • Affiner et rendre « ready » les éléments des Backlog (Commun et Produits)
  • Evaluer toutes les interdépendances de la prochaine release et commencer à les adresser
Intensifier les synchros entre PO

La période est propice au désalignement, à la désynchronisation. Il faut donc s’assurer que les rituels PO/sync sont bien en place voire les intensifier (passer à une fréquence hebdo) pour assurer la cohérence entre les options structurantes prises par les différents PO

Le partage de l’information au niveau du programme

Un autre risque lié au confinement est que les équipes se referment sur elles-mêmes et oublient les échanges et la synchronisation avec les autres équipes de l’usine à logiciel.

D’où l’importance du partage d’informations : les faits marquants, les avancées, les risques, les demandes d’aide, les objectifs et les obstacles à franchir sur les prochaines semaines. Un processus hebdomadaire à respecter absolument et à partager sur un canal accessible à tous les acteurs du programme.

Derrière ce partage, il y a forcément un travail de consolidation qui va permettre de s’assurer de la bonne prise en compte des enjeux, d’une bonne répartition des responsabilités.

La vision de synthèse doit être publiée et outre les faits et les constats, elle doit être utilisée pour créer de la solidarité et reconnaitre le travail de l’ensemble des parties prenantes. Elle doit également être utilisée pour vérifier l’alignement.

EN SYNTHÈSE

Revoir complètement le processus PI planning et l’organisation des sprints. Profiter de la phase de confinement pour avancer sur la dette technique, les performances, les « petites douleurs » remontées par les clients en dédiant quelques sprints. Resserrer le pilotage, les synchronisations.

Chapitre 4 : les outils au service de l’agilité « à distance »

Aussi bien au niveau de l’équipe agile que pour la synchronisation à l’échelle, l’outillage est un facteur différenciant et clé pour la réussite des équipes en confinnement. Mieux les équipes sont outillées, plus facile sera l’organisation et le maintien d’une productivité et d’un semblant de normalité.

Première difficulté : les outils de travail à distance sont en train d’exploser. Nous en découvrons un nouveau tous les jours. Il faut donc tester, choisir et surtout pro ter de l’expérience de ceux dans l’équipe qui ont déjà des expériences réussies.

L’idée est de très vite établir un synoptique avec le grand processus qui part de l’idée jusqu’à la mise en production d’une release. De positionner les rituels et autres moments de partage, et de positionner les outils. Ceux qui sont recommandés par la grande « tribu », et ceux qui peuvent servir les besoins propres de l’équipe. Sans se transformer en spécialiste de l’outillage, il devient indispensable, pour les équipes agiles, de gérer leur « caisse à outils » et de désigner les référents pour cela.

Quelques exemples (Tasmane ne vend pas d’outil !) :

  • Le PO peut faire de l’idéation et de l’itération (design thinking) avec des outils adaptés comme « Coggle », « Figma » ou encore « Hotjar »Trello
  • Pour les retrospectives des outils de facilitation visuelle et d’animation d’ateliers à distance sont bien adaptés (Draft.io, Mural, Beekast ou encore Klaxoon). Sur ce dernier outil, on retrouve des ateliers prédéfinis de planning pocker, permettent de réaliser l’exercice phare de priorisation.
  • Pour la gestion du backlog, le suivi de l’avancement, ou encore le suivi des anomalies : les outils déjà peuvent être réalisés dans des outils comme Jira, Icescrum, Redmine, iobeya.
  • Trello et MS Planner pour la gestion des tâches.
  • Et les indispensables outils de collaboration et de visio comme Zoom, MS Teams, Miro, Jitsi, mai aussi Tchapp et webconf (proposé par la DINUM pour les agents publics). Certaines applications citées intègrent nativement des tableaux blancs, très utiles pour brainstormer et co-construire entre les membres de l’équipe agile.

Certaines applications proposent, pour cette période de confinement, des versions gratuites ou des périodes d’essai allant jusqu’à 3 mois, proftez-en !

Outils de l'agilité

Chapitre 5 : les enseignements à tirer pour « l’après »

La période actuelle a quand même la vertu de démontrer que le travail à distance, en équipe, dépasse ce que nous avions imaginé. Les collaborateurs s’adaptent, certes parce qu’ils sont bien obligés, mais s’adaptent plutôt bien, de nouvelles pratiques émergent, et même si l’efficacité des équipes n’est pas optimale, elle n’est pas réduite de moitié pour autant. Citons un client Product Manager sur une grosse plateforme de 150 personnes : « Chaque jour une heureuse découverte de la capacité d’adaptation des équipes… »

Ce qui est peut-être le plus surprenant est la capacité de chaque équipier de vouloir se rapprocher de ses interlocuteurs en cherchant à réduire la « distance professionnelle » malgré la distanciation physique. Dans beaucoup d’entreprises, et notamment dans les équipes orientées technologies, la question du multi-sites est un problème récurrent. Et les justifications pour refuser des options d’organisation dans une géographie déconcentrée sont nombreuses : « trop difficile de manager une équipe en multisites », « perte de productivité, déperdition d’énergie », « perte d’intimité et de proximité »…

Beaucoup de collaborateurs pointent des questions de qualité de vie au travail (QVT), et les inconvénients liés à l’obligation de se colocaliser pour intégrer un projet agile ou une nouvelle organisation en Squad. Alors qu’ils avaient trouvé l’équilibre familial dans une autre ville.

Ces interrogations se posent également pour le télétravail, qui bien que des dispositions légales l’encadrent désormais, est (trop) souvent « refusé » sous prétexte que la collaboration est trop complexe. Ou que le télétravail fait peur au manager qui se voit perdre le contrôle sur les collaborateurs. Les prétextes pour ne pas faire doivent être challengés en regard des enseignements de la période actuelle et des progrès effectués sur le fonctionnement en équipe physiquement dispersée.

L’intérêt de l’écrit

A distance, on écrit plus : de mail, de chat, de todo list… Le travail à distance stimule
le partage d’écrits, que ce soit des documents en co-construction ou des listes de problèmes à traiter. L’écrit implique de prendre le temps de formaliser sa pensée. Il permet à chacun de faire des propositions argumentées (en particulier sur la résolution de problèmes), de prendre connaissance d’avis contradictoires sans réagir trop spontanément, sans trop réfléchir.

Le partage par écrit des problèmes fait progresser la transparence et le droit à l’erreur. L’écrit sert l’intelligence collective et donc limite certainement les jeux de pouvoir et d’in uence. Chacun peut contribuer, quasiment à son rythme, sans être dépassé par les plus brillants à l’oral ou les plus exubérants. De plus, il permet de pérenniser le savoir qui s’en retrouve davantage factualisé.

Les réunions

Les réunions sont plus rapides, sans retard ou presque au démarrage (pas de délai de déplacement entre deux réunions), et souvent plus courtes. Les supports sont partagés sur tous les écrans, tout le monde voit bien… contrairement à un support partagé dans une salle de réunion qui n’est visible que des premiers rangs.

Quand les règles pour s’exprimer et s’écouter à distance sont dé nies, la parole est mieux partagée, mieux répartie. On se coupe moins la parole, du fait de la latence (on le voit bien en ce moment dans les débats ou interviews télévisuels). L’écoute est ainsi de meilleure qualité.

Les réunions à distance nécessitent une concentration plus importante si bien que, en période de confinement elles ont tendance à se multiplier impliquant une certaine forme de fatigue mentale. Chacun a donc naturellement choisi (consciemment ou pas) d’optimiser son temps de réunion en faisant du super u, et s’extirpant de la réunionite. Et au final, il y a surement moins de réunions inutiles ou inefficaces.

La transparence et l’alignement

L’idée même de la transparence doit être travaillée et déclinée à l’échelle du dispositif humain global, de la tribu, de l’usine à logiciels. Le partage de l’information est
un sujet clé, mais non trivial qui mérite réfexion pour accoucher d’une politique pertinente.

Dans ce monde où la stratégie est prise en tenaille entre le « time to market » et le chaos (des compétiteurs, de la géo politique, des crises diverses), l’agilité devient plus que nécessaire. Et pour être agile, pour donner de l’autonomie aux équipes, l’alignement doit être radical : alignement sur la stratégie, alignement sur la trajectoire, alignement du discours vers l’ensemble des parties prenantes de son écosystème.

Le rôle du manager

Les managers peuvent être inquiets : comment se faire entendre lorsque les troupes sont complètement dispersées ? Pour certains collaborateurs, l’éloignement du chef est une réelle source de souffrance. Elle peut pourtant s’avérer bénéfique pour l’équipe lorsqu’elle permet de souder davantage les membres.

Le manager leader doit miser sur la cohésion de l’équipe. Sa mission est de permettre à chaque membre de l’équipe de trouver sa place, sa valeur puis de la reconnaître.

Son autre mission principale, qui va de pair, est de chercher les moyens les plus efficaces pour favoriser la communication dans l’équipe.

Quand chacun connait son utilité et quand la communication fonctionne, alors
le ciment qui lie le collectif fonctionne aussi à distance, sans que le leader soit physiquement sur place avec son équipe. C’est cette cohésion qui va garantir son leadership et permettre d’atteindre des objectifs communs.

La colocalisation virtualisée

L’agilité monte en puissance. Les technologies envahissent toutes les entreprises, tous les secteurs économiques et étatiques. Et l’arrivée de l’IA et du Big Data ne va faire qu’ampli er le phénomène. Ce qui veut dire toujours plus de digital, de logiciels, et donc de logiciel à produire.

Les ressources manquent pour produire ces logiciels, et la pénurie va perdurer.
La période de confinement démontre que faire de l’agilité en mode « ressources dispersée » est possible. Les apprentissages nombreux durant cette période vont nous permettre d’envisager de nouvelles organisations du travail, de nouveaux modes de partenariats, en délocalisé. Il faut de fait sortir du dogme «colocalisé». La période ouvre de nouveaux horizons pour s’organiser différemment, avec plus de souplesse.

Nous pourrions enrichir cette réflexion en considérant que le télétravail est une sorte de gestion multisite poussée à l’extrême puisque chaque collaborateur se trouve sur un site différent. Et donc ce qui a l’air de fonctionner en télétravail grâce l’adaptation des équipes agiles devrait pouvoir fonctionner aussi (et voire même encore mieux) pour des équipes agiles réparties sur plusieurs sites.

Et par conséquent en sortant du dogme « les équipes agiles doivent être colocalisés » cela nous permettrait d’envisager de nouvelles options de mise en place d’équipe à l’échelle (mondiale).

Alors, OUI au télétravail, OUI au délocalisé, et OUI au multisite, virtualisé ou pas.

 

EN SYNTHÈSE

Pour Tasmane, cette période de confinement est une opportunité incroyable de transformation. L’impossible est devenu possible : le manager prend pleinement son rôle de Servant Leader, la transparence et l’alignement sont plus forts grâce à l’écrit et à une contribution de tous, la réunionite est abolie. « Merci l’agilité en télétravail, bienvenue à l’agilité en multisite » ?